Ouverture des hostilités, donc, au travers d’un film qui ose mélanger SF, fantastique et métaphysique, dans une histoire en trois épisodes étalée sur 1000 ans et avec deux Wolverine de plus que la plupart des films à l’affiche (Le Prestige, Scoop, Flushed Away), soit trois.
Ça s’appelle The Fountain.
Avant d’entamer le vif du sujet, notez que le présent post ne dévoile rien de particulier quant à l’intrigue, pour quiconque se rassasie d’une ration hebdomadaire raisonnable de bandes annonces et de synopsis. Et puis, tout le monde le sait, c’est Émile le tueur.
On imagine assez bien Darren Aronofsky, le réalisateur, en maniaque tourmenté, occasionnellement l’oeil vitreux et la tignasse hirsute, le petit doigt tremblotant au rythme d’un métronome posé sur sa table de chevet pour s’endormir. Ses films précédents partageaient en effet un côté obsessionnel jusqu’au-boutiste qui avait choqué les âmes sensibles.
Dans Pi, l’obsession était d’ordre scientifique: il fallait trouver la solution au problème mathématique, quitte à en sacrifier sa raison. Dans Requiem For A Dream, chaque personnage alimentait une addiction culturelle (l’argent, la drogue, la télévision) qui l’entraînait dans une spirale infernale. The Fountain se défait de l’esprit quelque peu malsain de ses prédécesseurs et recentre le sujet: les trois héros ne sont qu’un et ils partagent une même obsession, émotionnelle cette fois. L’amour, au travers de la recherche d’immortalité.
Graphiquement, le film brille. Des décors amazoniens aux paysages cosmiques, qui rappellent sans les envier ceux du Solaris de Soderbergh, les images distillent une riche ambiance suspendue entre mythe et métaphysique. Coincé au milieu, l’épisode contemporain semble bien froid face à l’héroïsme aventurier des conquistadores ou le futur symbolique et abstrait.
Fidèle au poste, Clint Mansell livre une bande originale à l’image de l’histoire: une ritournelle entêtante qui tourne et se répète, inlassablement. Il se développe ainsi une inéluctabilité musicale et narrative qui fait autant la force que la faiblesse du film: les éléments s’enchâssent minutieusement, les images valsent, les trames se recoupent et se complètent. La maniaquerie presque helvétique de l’horlogerie semble abolir tout espoir de tension ou d’ambiguïté.
Au final, le puzzle est si parfait qu’avec le recul on n’en distingue plus les pièces et l’oeuvre se résume à un tableau, certes resplendissant, mais aussi lisse, alors que notre esprit aurait voulu jouer avec un peu plus librement.
Note: 5/7